[OLD] One Piece film 6 : l'ile mystérieuse du Baron Omatsuri
...est la traduction pas tout à fait exact du titre original de Omatsuri Danshaku to Himitsu no Shima, le sixième film de One Piece. Mais on s'en moque, elle rends mieux la nature de l'intrigue de ce long-métrage : le sympathique équipage pirate du Going Merry a besoin de vacances. Ça tombe bien, une bouteille repêchée à la mer plus tard et les voilà en possession d'une carte donnant les coordonnées d'une ile enchanteresse leur promettant moult activités dignes d'un club méd' pour pirates. Mais une fois sur place, ils découvrent qu'ils ont été floué et qu'il leur faudra remporter une succession d'épreuves de plus en plus cinglées pour profiter de leurs vacances au paradis. Mais est-ce la seule surprise que recèle l'île, ou bien est-ce qu'un piège bien plus sinistre n'est pas en train de se refermer sur nos héros ?
Ce sixième film de One Piece fut le premier véritable long-métrage réalisé par Mamoru Hosoda, et pour faire court, c'est un petit bijou. Deux principales raisons à ça.
Primo, le design du film n'hésite pas à s'éloigner du canon de la série TV pour un look plus simple et plus adapté aux scènes d'animations ébouriffantes. Par rapport à la série d'origine, Luffy et ses amis semblent par moments sortir tout droit d'un épisode de Kemonozume, avec des formes volontiers plus anguleuses et n'hésitant pas à prendre des libertés par rapport aux designs originaux de la série. Le tout au service d'une animation dynamique et qui réserve quelques sympathiques morceaux d'anthologie; en effet, Hosoda a réussi à rassembler autours de lui un nombre incroyable d'animateurs de talent, et le staff mériterait un article à part rien que pour être détaillé plus en détail. A noter qu'on doit entre autre ces transformations du chara-design à la participation de de Sushio au film, lequel édita par la suite un dôjinshi sur son travail.
A contrario, les décors, magnifiques, sont ultra-détaillés : jungle luxuriante, canaux tout droit sortis d'une Venise tropicale, palaces au luxe insolent. Ce mélange entre décors très réalistes, détaillés, et des designs plus simplifiés pour les personnages est devenu l'une des caractéristiques les plus reconnaissables des films de Hosoda.
Secondo, le scénario. L'histoire, originale, utilise relativement peu d'éléments propres à l'univers de la série de Eiichiro Oda - Hosoda brode autour, fait un peu ce qu'il veut, aux limites de l'univers d'une franchise à laquelle il est étranger. Ce qui contribue à conférer une identité propre à ce film et à le rendre accessible aux non-fans.
La narration est une des réussites du film. Eclatée entre les personnages, elle passe régulièrement de l'un à l'autre au gré des épreuves farfelues imposées à l'équipage du Going Merry. Cette approche est destinée avant tout à cultiver le suspens et l'intérêt chez le spectateur : on progresse par petites touches impressionistes, tandis que les épreuves bon enfant des débuts laissent petit à petit la place au secret macabre que dissimule l'ile et son baron. Des bouts du secret sont révélés lors de courts passages dramatiques (la discussion entre Nami et Mushigoro, premier signe que quelque chose de vraiment malsain se déroule sur l'ile), intercalés entre de plus longues séquences jouissives d'animation débridée (la course dans les canaux, la pèche au poisson rouge). La pression ne retombe jamais. On peux aussi remarquer que la progression de l'intrigue se calque sur celle de l'écoulement du temps : l'intrigue du film prends place grosso modo sur vingt-quatre heures, et si les épreuves en journée sont prétexte à de nombreux gags, c'est au crépuscule que le ton change radicalement, prélude au tour sinistre que prennent définitivement les évènement à la nuit tombée. Le film est parfaitement bien construit, comme souvent avec Hosoda. Ce qui doit tenir de sa méthode de travail, puisqu'il expliquait dans une des interviews de Tokikake qu'il avait l'habitude de travailler avec un premier storyboard abrégé (dont une vignette = quatre vignettes du storyboard final), ce qui lui donne une bonne idée du rythme final du film.
Un peu comme dans Kaarib, la bédé barrée de David Calvo et Jean-Paul Krassinsky, le film baigne dans une ambiance schizophrène à mi-chemin entre un Mardi Gras bien festif à la Nouvelle Orléans ("Omatsuri" le nom du baron fait justement référence à un festival), et un ton qui devient progressivement plus sombre et qui évoquerait alors l'univers inquiétant du vaudou (le titre "Baron" de l'antagoniste principal correspond bien à cette figure, proche d'un baron Samedi, dominé par le thème de la mort et de la magie).
A l'instar d'une série telle que Utena, au final le secret de l'île est de constituer un décor enchanteur de contes de fées qui aura servi à dissimuler une réalité macabre prenant ses racines dans un drame humain et le refus de'affronter la réalité en face après un évènement traumatisant. Comparaison intéressante quant on sait que Hosoda avait réaliser le storyboard de plusieurs épisodes de la série culte de Ikuhara, dont un dernier épisode où l'une des héroines est offerte en sacrifice à des lames symbolisant toute la peur, la haine et le ressentiment de l'humanité; difficile de ne pas trouver l'écho de cette scène dans elle où, lors de la confrontation finale entre le Baron et Luffy, ce dernier est transpercé par des milliers de flèches symbolisant la douleur du Baron.
One Piece - Omatsuri Danshaku to Himitsu no Shima réussit le tour de force d'être à la fois drôle, mystérieux, barré et inquiétant. Cerise sur le gateau, il propose une animation de qualité et bien moins conventionnelle que ce qu'on peux voir dans maintes franchises qui ont pourtant plus de succès auprès des fans d'animation nippone. Mieux que ça, on a là aussi un film personnel d'un réalisateur charismatique qui laisse à chaque fois sa marque et son goût pour des problématiques plus humaines et réalistesdans ses travaux. Ici, qu'est un capitaine - un chef - sans son équipage ? - son équipe ? Un thème particulièrement personnel quand on se souvient de ses déboires au studio Ghibli quelques années auparavant.
Filmographie (complètement partielle et incomplète) de Mamoru HOSODA (細田守)
:
Publication originale : 7 août 2007 (13:21)
Ce sixième film de One Piece fut le premier véritable long-métrage réalisé par Mamoru Hosoda, et pour faire court, c'est un petit bijou. Deux principales raisons à ça.
Primo, le design du film n'hésite pas à s'éloigner du canon de la série TV pour un look plus simple et plus adapté aux scènes d'animations ébouriffantes. Par rapport à la série d'origine, Luffy et ses amis semblent par moments sortir tout droit d'un épisode de Kemonozume, avec des formes volontiers plus anguleuses et n'hésitant pas à prendre des libertés par rapport aux designs originaux de la série. Le tout au service d'une animation dynamique et qui réserve quelques sympathiques morceaux d'anthologie; en effet, Hosoda a réussi à rassembler autours de lui un nombre incroyable d'animateurs de talent, et le staff mériterait un article à part rien que pour être détaillé plus en détail. A noter qu'on doit entre autre ces transformations du chara-design à la participation de de Sushio au film, lequel édita par la suite un dôjinshi sur son travail.
A contrario, les décors, magnifiques, sont ultra-détaillés : jungle luxuriante, canaux tout droit sortis d'une Venise tropicale, palaces au luxe insolent. Ce mélange entre décors très réalistes, détaillés, et des designs plus simplifiés pour les personnages est devenu l'une des caractéristiques les plus reconnaissables des films de Hosoda.
Secondo, le scénario. L'histoire, originale, utilise relativement peu d'éléments propres à l'univers de la série de Eiichiro Oda - Hosoda brode autour, fait un peu ce qu'il veut, aux limites de l'univers d'une franchise à laquelle il est étranger. Ce qui contribue à conférer une identité propre à ce film et à le rendre accessible aux non-fans.
La narration est une des réussites du film. Eclatée entre les personnages, elle passe régulièrement de l'un à l'autre au gré des épreuves farfelues imposées à l'équipage du Going Merry. Cette approche est destinée avant tout à cultiver le suspens et l'intérêt chez le spectateur : on progresse par petites touches impressionistes, tandis que les épreuves bon enfant des débuts laissent petit à petit la place au secret macabre que dissimule l'ile et son baron. Des bouts du secret sont révélés lors de courts passages dramatiques (la discussion entre Nami et Mushigoro, premier signe que quelque chose de vraiment malsain se déroule sur l'ile), intercalés entre de plus longues séquences jouissives d'animation débridée (la course dans les canaux, la pèche au poisson rouge). La pression ne retombe jamais. On peux aussi remarquer que la progression de l'intrigue se calque sur celle de l'écoulement du temps : l'intrigue du film prends place grosso modo sur vingt-quatre heures, et si les épreuves en journée sont prétexte à de nombreux gags, c'est au crépuscule que le ton change radicalement, prélude au tour sinistre que prennent définitivement les évènement à la nuit tombée. Le film est parfaitement bien construit, comme souvent avec Hosoda. Ce qui doit tenir de sa méthode de travail, puisqu'il expliquait dans une des interviews de Tokikake qu'il avait l'habitude de travailler avec un premier storyboard abrégé (dont une vignette = quatre vignettes du storyboard final), ce qui lui donne une bonne idée du rythme final du film.
Un peu comme dans Kaarib, la bédé barrée de David Calvo et Jean-Paul Krassinsky, le film baigne dans une ambiance schizophrène à mi-chemin entre un Mardi Gras bien festif à la Nouvelle Orléans ("Omatsuri" le nom du baron fait justement référence à un festival), et un ton qui devient progressivement plus sombre et qui évoquerait alors l'univers inquiétant du vaudou (le titre "Baron" de l'antagoniste principal correspond bien à cette figure, proche d'un baron Samedi, dominé par le thème de la mort et de la magie).
A l'instar d'une série telle que Utena, au final le secret de l'île est de constituer un décor enchanteur de contes de fées qui aura servi à dissimuler une réalité macabre prenant ses racines dans un drame humain et le refus de'affronter la réalité en face après un évènement traumatisant. Comparaison intéressante quant on sait que Hosoda avait réaliser le storyboard de plusieurs épisodes de la série culte de Ikuhara, dont un dernier épisode où l'une des héroines est offerte en sacrifice à des lames symbolisant toute la peur, la haine et le ressentiment de l'humanité; difficile de ne pas trouver l'écho de cette scène dans elle où, lors de la confrontation finale entre le Baron et Luffy, ce dernier est transpercé par des milliers de flèches symbolisant la douleur du Baron.
One Piece - Omatsuri Danshaku to Himitsu no Shima réussit le tour de force d'être à la fois drôle, mystérieux, barré et inquiétant. Cerise sur le gateau, il propose une animation de qualité et bien moins conventionnelle que ce qu'on peux voir dans maintes franchises qui ont pourtant plus de succès auprès des fans d'animation nippone. Mieux que ça, on a là aussi un film personnel d'un réalisateur charismatique qui laisse à chaque fois sa marque et son goût pour des problématiques plus humaines et réalistesdans ses travaux. Ici, qu'est un capitaine - un chef - sans son équipage ? - son équipe ? Un thème particulièrement personnel quand on se souvient de ses déboires au studio Ghibli quelques années auparavant.
Filmographie (complètement partielle et incomplète) de Mamoru HOSODA (細田守)
:
- 1999 : Digimon Adventure (enshutsu ep. 21)
- 1999 : Digimon Adventure (film 1)
- 2000 : Digimon Adventure: Bokura no War Game (film 2)
- 2002 : Ojamajo Doremi Dokkan (enshutsu ep. 40, 49)
- 2003 : Superflat Monogram
- 2005 : One Piece film 6 - Omatsuri danshaku to himitsu no shima
- 2006 : Toki wo kakeru shôjo
- Les films de Digimon de Hosoda sur Anipages
- Dossier sur Manganimation
Commentaires
Enregistrer un commentaire